Compulsion #19

Mystère mystérieux

Une série

Visitors sur Warner TV – bouquet Canal+.

 

Je vais être directe et honnête, je suis un peu (beaucoup) amoureuse de Simon Astier, en tout cas, du cerveau créatif de Simon Astier. Je suis sapiosexuelle de Simon Astier (ça existe ça ?). Depuis que j’ai regardé Hero Corp que j’ai adoré, après l’avoir découvert dans son rôle de Yvain, chevalier débilos dans Kaamelott, j’éprouve ce sentiment d’amour mêlé d’admiration pour lui et dès qu’il apparaît quelque part, je ne peux m’empêcher d’y aller le cœur battant, sachant pertinemment que je ne serai pas objective et que je vais kiffer ce que je vais voir.

Ceci étant posé, obviously, j’ai donc aimé très fort les trois premiers épisodes de Visitors, la nouvelle série SF hommage aux films des années 80-90 qu’il vient de sortir. Évidemment, je suis en plein dans la cible, puisque j’ai peu ou prou le même âge qu’Astier et que je partage les mêmes références culturello-geeks, et que je suis assez fan de SF (ça se voit que j’essaie de me vendre pour le séduire ou pas ?).

L’ambiance petite ville proche d’une ancienne base militaire, l’imagerie lotissement à l’américaine très 90s, les clins d’œil aux tropes du genre avec des agents en noir mystérieux et des flics bourrus, Visitors a un côté Pamela Rose rencontre X-Files qui n’est vraiment pas pour me déplaire.

Du côté de l’histoire, on est dans la ville de Pointe-Claire et on suit Richard Garcia pour son premier jour de travail en tant que flic dans la police locale alors que dans la nuit, un étrange phénomène lumineux a été vu dans le ciel avant de s’écraser et d’embraser la ferme d’un habitant du coin.

Richard est un enfant du cru, il a passé toute sa vie à Pointe-Claire et, apparemment, c’est assez pesant pour qu’il ait envie de changer un peu sa routine. Sa copine Nancy (Tiphaine Daviot) est agent immobilier travaillant en duo avec un Arnaud Tsamère hilarant dans son rôle de Brett Mendoza et pas/plus hyper amoureuse apparemment, ses (ex) potes Bob et Mitch (Vincent Dessagnat et Damien Jouillerot) sont les vendeurs geeks d’un magasin de jeux vidéos en perdition et on comprend que son grand-père est un ancien flic de la brigade locale qui a “pété les plombs”. La petite ville va ainsi devenir le théâtre de phénomènes aliens et de tout ce que les rencontres du troisième type peuvent avoir de plus dingue, le tout en gardant les pieds fermement sur Terre et en suivant l’évolution de Richard et son entourage.

En plus d’une histoire alléchante d’extra-terrestres qui débarquent dans une petite ville pleine de secrets, on retrouve pour faire vivre tout ça un casting très chouette d’humoristes et d’acteur·ices français·es plein·es de talent. Outre celleux que je vous ai déjà cité, on retrouve Gérard Darier dans le rôle du Shérif (qui jouait déjà avec Simon Astier dans Hero Corp), Gregoire Ludig et David Marsais (Palmashow), Adrien Ménielle (que vous avez peut-être vu récemment dans Derby Girl, ou le très beau Fantasme d’Eléonore Costes), Jérôme Niel, Alban Lenoir (aussi dans Hero Corp)… Bref, on part sur une belle brochette de gens sûrs et de jeunes talents que j’ai hâte de voir en action au fil de cette première saison.

Ce que j’aime le plus chez Astier, je crois, c’est son écriture, sa façon, aussi bien de créer des univers et des personnages crédibles et à la fois délirants, d’y mêler un humour absurde et froid et de mixer tout ça dans de la bonne SF des familles. Je crois que j’aime Visitors parce que j’aurai aimé écrire un truc pareil et que, voir une histoire comme celle-là exister sous forme de série, ça me donne encore plus envie de donner vie à ce genre d’aventures et de personnages.

Comme dans Hero Corp où les personnages avaient des super-pouvoirs mais étaient aussi des super losers, les habitants de Pointe-Claire semblent aussi avoir ce background de la lose et devoir se confronter à l’extraordinaire pour surmonter ce qu’ielles sont. Toujours arrosé de dialogues savoureux et d’un humour pince-sans-rire, Visitors a définitivement la “Astier touch” : des personnages profondément humains, bancals, vulnérables mais beaux et drôles à la fois, à qui il arrive des aventures incroyables, dans un monde qui moque tout ce qu’il y a de plus déglingué dans le nôtre.

Vous l’aurez compris, Visitors, c’est un grand oui d’amour. Foncez ! 1 Les épisodes sortent chaque mardi sur Warner TV (bouquet MyCanal).

Bonus track : Simon Astier était l’invité de l’émission Par Jupiter sur France Inter pour parler de la série et de plein d’autres choses, je vous conseille d’aller l’écouter !

 

Un livre

Ghostland : An American History in Haunted Places de Colin Dickey.

 

J’ai deux passions dans la vie (je mens j’en ai mille mais pour le bien de cette Compulsion, on va se concentrer sur deux d’entre elles) : les Etats-Unis et l’étrange. Dans Ghostland, Colin Dickey unit les deux et gratte toutes mes cordes sensibles avec du paranormal et de l’Histoire, du storytelling de qualité et du récit non-fictionnel passionnant.

Après le bac, j’ai fait des études en fac d’anglais uniquement parce que je voulais être capable de parler la langue le mieux possible dans le but de devenir journaliste de rock (ce raisonnement me paraissait tenir la route à l’époque). Ainsi, en passant par les bancs de l’université j’ai découvert plus en profondeur l’Histoire de ce pays, une histoire “récente” et complexe. Les States et moi, c’est une grande histoire d’amour, un rapport entre fascination et rêves d’une enfant qui a grandit dans la pop culture des années 90. J’en ai déjà parlé ici, j’ai toujours eu l’impression que ce pays était une sorte d’objectif à atteindre (d’aucun diront que la propagande impérialiste américaine a bien fait son taf sur moi), que là-bas tout était mieux, plus grand, plus beau, plus vivant, plus cool, plus, plus, plus… ! Et même lorsque j’ai compris que les “plus” de l’Amérique pouvaient se situer dans tout ce qui se fait de pire (racisme, puritanisme religieux, capitalisme outrancier…), j’ai continué d’être fascinée par ce pays.

Pour le côté étrange, je ne me l’explique pas trop. J’ai toujours été attirée par le chelou, le paranormal (je fais partie de ces gens qu ont été abonnés à Facteur X, le magazine du paranormal, des théories conspis et autres légendes urbaines des années 90, si tu en fais partie, j’espère que tu as encore le pin’s tête d’extra-terrestre offert avec le premier numéro), les histoires de fantômes… Idem, j’en ai déjà parlé ici quand j’ai évoqué mon amour pour les slashers et la renaissance de mon attrait pour l’horreur, j’étais, dès mon plus jeune âge, une enfant bizarre qui s’intéressait à l’invisible et je suis restée la même en version adulte.

Forcément, quand je suis tombée sur la couverture de la version ebook de Ghostland, j’ai été appâtée et encore plus lorsque j’ai lu le résumé du bouquin.

Colin Dickey is on the trail of America’s ghosts. Crammed into old houses and hotels, abandoned prisons and empty hospitals, the spirits that linger continue to capture our collective imagination, but why? His own fascination piqued by a house hunt in Los Angeles that revealed derelict foreclosures and « zombie homes, » Dickey embarks on a journey across the continental United States to decode and unpack the American history repressed in our most famous haunted places.2

C’est surtout la dernière phrase qui m’a interpelée, celle qui établit le lien entre l’histoire peu reluisante des États-Unis (à la fois, quel pays à une histoire où il n’est pas questions de guerres, de morts, de colonisation ou d’esclavagisme ?), pays qui a tout fait pour étouffer cela et garder son image d’Eldorado, et les lieux hantés.

Voir les lieux hantés comme des symboles de l’histoire réprimée d’un pays est une analyse qui n’est pas nouvelle – nombreux·ses sont les chasseur·ses de fantômes qui ont établit un lien entre l’histoire traumatique d’un lieu et la présence de fantômes, mais à l’échelle d’un pays, c’est une idée que, personnellement, je n’avais jamais entendue. Et je suis ravie que Colin Dickey ait choisi cet angle pour nous parler des lieux hantés les plus célèbres du pays (et ils sont nombreux).

Qu’il nous emmène dans des maisons singulières comme la Maison Winchester de San José, des domaines d’anciens propriétaires de champs de cotons comme Myrtles Plantation, des hôpitaux (psychiatriques ou non) abandonnés, des hôtels mystérieux d’Hollywood, des cimetières, des champs de batailles de la guerre de Secession, de prisons, ou de villes entières aux voisinages emplis de fantômes, Dickey explore les légendes d’outre-tombe avec le regard curieux de l’historien, en faisant tout son possible pour ne pas tomber dans l’écueil du débunkeur cynique qui se moque, plus ou moins gentiment, de celles et ceux dont il relate les témoignages.

Il ajoute à ses explorations des tonnes d’informations sur l’architecture, l’histoire du pays, notamment à partir des années 1800 et de son expansion de l’est à l’ouest, et il ne se contente pas de simplement parler une énième fois des légendes qui entourent les lieux où il nous emmène.

C’est une lecture qui régalera les amateur·ices de ghost hunt comme celleux d’histoire et de culture américaine. Les fantômes ici ne sont pas là pour nous faire peur, mais plutôt pour nous confronter à une vérité, un pan de l’Histoire du pays qu’on ne veut pas voir, dont on ne veut plus parler. La peur, finalement, vient lorsqu’on réalise à quelle Histoire sont liés ces fantômes, à quels drames, à quelle cruauté du passé ils nous ramènent. Se rendre compte que son pays “de rêve” est fondé sur le sang, la mort, la violence, la destruction systématique, la maltraitance… c’est sur que ça fait peur, surtout pour son avenir, qui, d’autant plus aujourd’hui, semble de retourner vers ces valeurs fondatrices bien sombres.

J’en profite pour vous envoyer encore une fois écouter l’excellent podcast de River-James et Candy, Phantoms and Everything Weird (c’est en français) qui parle de ghost hunt, de lieux hantés, de légendes urbaines, de cryptozoologie, de paranormal en général et qui est passionnant et dont certains épisodes traitent de lieux évoqués dans le livre de Colin Dickey.

 

 

 


1

PS : Simon, j’ai écrit un livre de SF drôle qui s’appelle Gidéon et que j’ai envie d’adapter en scénario, on peut s’appeler ? (ça se voit que j’essaie de faire de la pub pour mon bouquin sur le dos d’un scénariste et réalisateur talentueux ?)

 

2

“Colin Dickey est sur la piste des fantômes de l’Amérique. Entassés dans de vieilles maisons et hôtels, des prisons abandonnées et des hopitaux désertés, les esprits qui s’y attardent continuent de captiver notre imagination collective, mais pourquoi ? De sa propre fascination, piquée lorsqu’il cherchait lui-même une maison à acheter, qui lui a rêvélé l’existence de saisies délabrées et des “maisons zombies”, Dickey nous embarque dans un voyage à travers le continent Etatsunien pour décoder et déballer l’histoire américaine réprimée dans nos plus célèbres lieux hantés”.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Articles similaires

Commencez à saisir votre recherche ci-dessus et pressez Entrée pour rechercher. ESC pour annuler.

Retour en haut