Alors, pose-toi, tranquille, relax.
Imagine-toi sur une plage, autour d’un feu de camp. Il y a évidemment un type qui joue de la guitare (évidemment) en toile de fond, des gens qui boivent des bière et fument des cigarettes qui font rire, ça papote, ça rigole, ça écoute le bruit des vagues et ça regarde les étoiles.
Quelqu’un sort nonchalamment un smartphone et une enceinte Bluetooth (ou un lecteur CD portable et une caisse de grosses piles, si t’as envie de voyager dans le temps avec cette visualisation) et, sans prévenir l’assemblée, se met à diffuser de la musique douce, teintée de blues, de rock et de folk. Un homme chante. Sa voix interrompt soudain les conversations autour du feu et le mec à la gratte sait qu’il ne chopera plus ce soir, lui qui misait tout sur ses trois accords et sa reprise de Wonderwall.
Cet homme qui chante, c’est Ben Harper. L’album, c’est Burn To Shine. Et la mise en situation l’été 1999 que j’aurai pu vivre si j’avais été en vacances au bord de la mer, mais du coup, j’étais en Ardèche donc c’était pas tout à fait pareil et pis les smartphones existaient pas encore.
Bernard Peur
Burn to Shine sort en 1999, alors que je suis en plein dans ma période rebelle-métal-vampires-trucs-qui-font-peur-à-ma-mère. J’entendais le nom de Ben Harper assez souvent à la radio, annoncé à l’affiche de festival comme les Eurockéennes mais je ne connaissais pas vraiment l’artiste. Et je ne m’en préoccupais pas vraiment, j’étais trop occupée à accrocher des posters de Cradle Of Filth dans ma chambre.
A cette époque, je passais environ une fois par semaine à la médiathèque de ma ville pour emprunter des CD. Et oui ma bonne dame, on n’avait pas les Internets comme maintenant, les Spotify, les Youtube et autres plateformes où la musique circule et voyage. Non, pour découvrir des artistes, il fallait se déplacer, chercher dans les bacs, chiner, se fier à la couverture d’un album et l’emprunter pour 2 à 4 semaines, max.
Je passai littéralement des heures avec ma meilleure amie à éplucher chaque CD de la section rock, à chercher les noms des groupes qu’on aimait, à découvrir des artistes qu’on ne connaissait pas, à reconnaitre des noms qu’on avait vu dans des magazines et hésiter à emprunter les classiques sous peine de passer pour des noobs (que nous étions).
Et je le voyais souvent, Ben Harper, dans le bac des nouveautés. C’était les années 90 et il commençait à se faire connaître. Il m’intriguait. Je me demandais si c’était pour moi, si ça allait me parler. Mais je ne le choisissais jamais, trop concentrée que j’étais sur d’autres groupes et d’autres styles.
Fast forward to 2003, environ, je suis à la fac et je passe moins de temps à la médiathèque les mercredis après-midi. Je vis à Lyon et je me fais de nouveaux potes, je découvre d’autres styles de musique aussi, parce qu’en grandissant, mon esprit s’ouvre vers des sonorités différentes : électro, dub, hadrtek, drum ‘n bass, mais aussi folk, soul, ska…Je me ballade en musique comme dans la vie.
Je me fais une amie à la fac grâce à notre affection partagée pour Enhancer (on a fredonné « Les kids mettent la guerre, les kids mettent la guerre, la Section Nowhere fout le souk, met la guerre » en même temps, en se rendant en cours et ce fut une révélation) et au détour de nos conversations, j’apprends qu’elle est fan de Ben Harper. Mais genre FAN-fan.
Je me dis alors qu’il faut vraiment que je laisse sa chance à ce type et au week-end suivant où je retourne chez ma mère, je passe par la médiathèque et j’emprunte Burn to Shine.
Plongée dans la douceur
Et là plouf, me voilà plongée dans un bain moussant d’amour, entourée d’une bulle de douceur, hypnotisée par la voix de monsieur Harper et par les mélodies blues/rock/folk de cet album.
Après des années à écouter des gens crier (ou presque), je (re) découvre une musique avec plus de poésie, qui parle de sentiments plus doux, le tout, d’une manière moins exaltée et colérique. Je découvre une version plus moderne du blues, un rock plus soft, une folk musique électrique.
Ben Harper oscille entre voix douce et forte sur des instrus toujours hallucinantes de beauté. Il passe du blues au rock à la pop et la folk avec brio au gré des morceaux de l’album. Si Please Bleed est une balade triste est véner, Burn to Shine a un petit côté country rock, Alone transpire la mélancolie et la peur alors que Two Hands of A Prayer, la douceur, l’espoir et l’amour et Steal my Kisses un pur moment de bonheur qui n’est pas sans me rappeler Kesiah Jones.
Cet album tient une place toute particulière dans mon T.A.R.D.I.S. musical. Pour une fois, il n’est pas lié à un ex-amoureux qui m’aurait brisé le cœur. Mais plutôt à une période entière, de plusieurs années, la fac. Ben Harper, c’est Julie sa plus grande fan, c’est Damien l’Australien mon voisin de cité U avec qui j’écoutais du Ben Harper en parlant baggy et pompes de skate, c’est la ville de Lyon, l’université Jean Moulin, le tram T2, Jean Macé, Sans Souci, Fourvière, le funiculaire et les soirées à St Jean.
Daddy Cool
La discographie de Ben Harper est aujourd’hui composée d’une vingtaine d’albums (studio, live) qui explorent des styles différents mais tournent autour du rock, du blues, de la folk et de la pop. Il est toujours très actif puisque le petit dernier date de mars 2018 ce qui signifie qu’avec un peu de chance et de détermination, je finirai par enfin le voir en concert ! (J’ai bien réussi à voir Lenny Kravitz l’année dernière, il n’y a pas de raison !)
Si je devais résumer la musique de Ben Harper je te dirai qu’elle est de celles qui te donnent envie de se câliner au coin du feu, d’écrire de la poésie, d’aller s’enfermer dans une cabane en foret et faire des balades dans la nature, de boire du café bio éthique au lait d’avoine, de rouler en fixie, de porter des chemises de bucherons et des chapeaux avec des plumes et des attrapes rêves… Oui, Ben Harper est un peu de papa de tous les hipsters du monde.
Respect !