Compulsion #16

Rest

Un adieu prématuré

Taylor Hawkins, batteur légendaire des Foo Fighters, 1972-2022.

Lors du concert à Mexico du 17 mars 2022. Photo par Liliana Estrada / OCESA

C’est toujours très compliqué de gérer ses émotions à la mort d’un·e artiste que l’on appréciait. En tout cas, ça l’est pour moi. Je suis toujours un peu le cul entre deux chaises, entre l’envie de ne rien dire et d’être triste dans mon coin et l’envie de partager cette tristesse avec le monde et dire à quel point il ou elle a marqué mon existence par son art.

Quand on est fan d’un·e artiste, d’un groupe de musique, d’un·e acteur·ice ou que sais-je, on fait partie d’une communauté et on sait qu’on va tous·tes plus ou moins éprouver la même émotion, plus ou moins fort, à la mort de celui ou celle qui a apporté tant de choses dans nos vies. On est ensemble dans un deuil étrange, à une place incongrue dans le cortège et on gère tous·tes d’une manière différente la façon dont on va exprimer notre peine. À l’heure où si ce n’est pas en ligne, ce n’est pas réel, on se sent parfois obligé·e d’avoir des mots pour exprimer ce que la disparition de quelqu’un de célèbre nous évoque. Que cela nous attriste vraiment ou que l’on s’en fiche royalement, il y a souvent un besoin irrépressible de dire… quelque chose, n’importe quoi, comme marquer d’une croix sur le calendrier la date de l’événement avec un statement en 280 caractères pour ne pas oublier, pour dire que ça nous avait fait… quelque chose, n’importe quoi.

En ce qui me concerne, je n’ai pas eu de mots pour exprimer ce que j’ai ressentis en apprenant le décès de Taylor Hawkins, batteur des Foo Fighters.

Apprendre la mort d’un·e artiste que l’on appréciait beaucoup, c’est perdre un membre d’une famille dont on ne fait pas vraiment partie. On ressent la perte, on ressent le vide, on ressent la peine et pourtant, la personne n’était “personne”. L’amour que l’on porte aux artistes est souvent unidirectionnel, on a l’impression de les connaître, ils et elles sont dans notre vie au quotidien par le biais de leur art, de leur musique, de leurs films, de leurs livres… et pourtant, ielles n’ont souvent aucune idée de notre existence, de la puissance de nos sentiments pour elleux. On les aime, on les admire, sans savoir qui ielles sont réellement mais au final, ce n’est pas la personne de la vraie vie que nous aimons, c’est l’artiste et son art. C’est un amour fort mais paradoxal et une peine forte mais paradoxale que l’on ressent, que je ressens. Et cela me gène peut-être un peu de devoir avoir des mots, ça me gène d’avoir le sentiment que dire quelque chose de ma propre peine, de mon admiration, de mon amour, de mes souvenirs de cet artiste atténuera un tant soit peu la peine de ses vrai·es proches. Celles et ceux qui partageaient sa vie, sa famille, ses ami·es, des gens qui ont travaillé avec lui ou elle… Je suis une petite larme dans un océan de tristesse, qui, face à un tsunami de chagrin, croit qu’elle pourra le rendre plus tolérable.

Taylor Hawkins est mort le 25 mars 2022 à Bogota en Colombie alors que les Foo Fighters étaient en tournée en Amérique du Sud. Sa disparition me rend triste car il était le batteur exceptionnel d’un groupe que j’aime énormément.

Il va nous/me manquer.

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