Puis les sept anges qui avaient les sept trompettes se préparèrent à en sonner.
Le premier sonna de la trompette,
Et les grands noms périrent un à un, artistes inspirants, laissant derrière eux la fragile trace d’une génération qui voulait tout changer, léguée à une génération qui ne sait même plus la lire.
Le deuxième ange sonna de la trompette,
Et les puissants vécurent sur le malheur des faibles, s’appropriant la terre pour la vendre à prix d’or à ceux qui meurent d’en extraire la vie.
Le troisième ange sonna de la trompette,
Et du ciel tombèrent des bombes sur les villes décimées, tuant les innocents pour la morale de quelques-uns. Un mensonge acquis comme La Vérité du plus grand nombre.
Le quatrième ange sonna de la trompette,
Et de ces lieux dévastés, vinrent des armées d’hommes qui ont tout perdu, venus tuer ceux qui ici, avaient encore un tant soit peu d’amour à perdre.
Le cinquième ange sonna de la trompette,
Et les peuples eux même, ayant perdu la foi en leur dieux invisibles, placèrent les démons de ce monde sur les trônes.
Le sixième ange sonna de la trompette,
Et j’entendis une voix unie, venant des quatre points cardinaux, appelant à l’aide leurs propres bourreaux, et je compris que le monde serait détruit par le feu pour le salut de la terre mère, et non des hommes.
Puis je vis un ange puissant descendre du ciel, enveloppé d’une nuée. Au-dessus de sa tête était l’arc-en-ciel; son visage était comme le soleil et ses jambes comme des colonnes de feu.
Il tenait dans sa main un petit livre ouvert. Il posa son pied droit sur la mer et son pied gauche sur la terre,
et il cria d’une voix forte, comme un lion qui rugit. Quand il eut crié, les sept tonnerres firent entendre leur voix.
Quand les sept tonnerres eurent fini de parler, j’allais écrire, mais j’entendis du ciel une voix qui disait: « Marque du sceau du secret ce qu’ont dit les sept tonnerres, ne l’écris pas. »
Alors l’ange que j’avais vu debout sur la mer et sur la terre leva sa main vers le ciel et jura, par cette explosion qui a créé le ciel, la terre et la mer : « Il n’y aura plus de délai, mais quand viendront les jours où l’on entendra le septième ange sonner de la trompette, alors vous irez tous crever de votre stupidité et de votre cupidité, parce que vous méritez l’enfer dans lequel vous vivez. »
Gidéon resta les yeux rivés sur l’écran quelques instants avant de s’exclamer : « C’est quoi c’délire ? » Il fit défiler l’e-mail de haut en bas, encore et encore, sélectionna le texte pour voir s’il n’y avait pas de caractères cachés qui en indiqueraient la provenance, mais rien. Juste ce message chelou à base de prophétie biblique. Décidément, ils manquaient pas de ressources les mecs au Niger pour renouveler leur scénario… ! Cette fois, ils n’avaient même pas fait mention d’une somme d’argent, plutôt inhabituel avec ce genre de loustics… Bref, clic, marquer comme tentative d’hameçonnage, corbeille.
Gidéon avala sa dernière gorgée de café et écrasa sa cigarette dans le cendrier posé à côté de son PC portable sur la table de la cuisine. Il se leva pour aller mettre la tasse dans l’évier, éteindre la cafetière et ranger le beurre dans le frigo avant de partir. Il était 8h00, l’heure d’aller attraper son RER pour aller au boulot de l’autre côté de Paris.
A 37 ans, Gidéon habitait dans la banlieue sud de Paris, à Fontenay-aux-Roses mais travaillait à l’est de la capitale. Une petite heure et demie de train tous les matins et si tout allait bien, tous les soirs ! Les joies de la vie parisienne dont certains rêvaient et dont lui se passerait bien après plus de cinq ans à en bouffer tous les jours.
Gidéon travaillait dans une foncière immobilière qui gérait des centres commerciaux. Là-bas, son boulot était de créer le contenu des sites web de ces centres, de faire apparaître les bons magasins, les promos, toutes ces conneries. Un job pas spécialement groovy mais ça payait le loyer et les sorties et l’ambiance de la boîte était cool. Il s’en accommodait tranquillement, lui qui n’avait pas spécialement d’ambition professionnelle et qui cherchait surtout des jobs pépères.
Au moment de fermer le clapet de son PC, il remarqua qu’un nouveau mail était arrivé le temps qu’il range ses petites affaires. Par curiosité, il cliqua sur l’enveloppe dans la barre de menu et ouvrit sa boîte mail.
De : Jean@ogc.eth
A : gideon@gmel.com
Objet : Faut qu’on parle !
« APOCALYPSE MMXVII
Puis les sept anges qui avaient les sept trompettes se préparèrent à en sonner.
Le premier sonna de la trompette,
Et les grands noms périrent un à un, artistes inspirants, laissant derrière eux la fragile trace d’une génération qui voulait tout changer, léguée à une génération qui ne sait même plus la lire… »
« Non mais ils abusent les mecs, là ! râla Gidéon. J’ai pas que ça à foutre moi ! ».
Il cliqua sur l’icône en forme de poubelle et supprima le message. Non mais franchement, deux fois qu’ils lui envoyaient leur mail à la con ! Il allait falloir qu’il regarde ses paramètres sur cette boite mail et qu’il mette un coup de clean là-dedans. Autre chose à foutre un lundi matin que de se faire pourrir par des spams !
Il ferma son ordinateur d’un coup sec, enfila sa veste, pris son sac à dos et ses clés et se dirigea vers la porte. Il enfilait ses chaussures quand son portable se mit à vibrer.
Appel Entrant
Jean +11 123 456 78 90
Qu’est-ce que c’était que ce numéro et qui c’était ce Jean ? Il laissa le téléphone sonner et l’appel aller sur boîte vocale. Si c’était important, il laisserait un message.
Punaise, les Jean, ce matin, ils s’étaient donné le mot pour l’emmerder !
…
« Vous comptez faire comment ? demanda Le Chef à Jean , lui envoyer un mail ?! Non mais vous déconnez à pleins tubes mon pauvre ami !
– Non, je suis on ne peut plus sérieux, dit Jean dans le plus grand des calmes, Le type sélectionné par le Grand Algorithme pour le job fait partie de cette génération d’Humains qui vivent accrochés à leurs ordinateurs et leurs téléphones, toujours fourrés sur Internet pour tout et n’importe quoi ! Je ne dis pas qu’on n’a pas bien fait de leur souffler l’idée de créer ce réseau de communication, loin de là, la preuve, on va s’en servir aujourd’hui pour entrer en contact avec Lui ! précisa-t-il. Du coup, un mail ça me semble le bon moyen de tenter une première approche, de manière subtile, sans trop le brusquer. »
Le Chef avait convoqué Jean pour un tête-à-tête après son petit coup lors de la dernière réunion. Ok, il avait accepté de céder à sa requête de garder le tas de cons en vie encore quelques temps mais il allait falloir que lui, Môssieur Jean le super-nouveau-qui-sait-déjà-tout se démerde pour trouver le clampin qui allait pouvoir venir défendre le bout de gras des Humains. Parce que même si la destruction n’était plus envisagée (pour le moment) les Instances devraient tout de même rencontrer un représentant pour se faire leur propre avis !
Et là, on commençait à être un peu dans la merde vu le niveau des autres d’en bas !
Le Grand Algorithme avait choisi Gidéon parce qu’il représentait à peu près tous les humains et aucun à la fois. Il était le juste milieu de l’occidental moyen de sa génération. Pas méchant mais pas spécialement gentil, pas con mais pas spécialement un génie. Un mec normal. Les Instances aimeraient bien ce genre de représentant : basique, milieu de gamme, moyen. Les Instances aimaient ce qui se trouvait dans la moyenne. Et quand elles rencontreraient Gidéon, elles se rendraient bien compte qu’il fallait laisser une chance aux Humains. Enfin c’est ce que Jean espérait. La réunion était prévue dans quelques jours et Gidéon n’était pas encore au courant de tout le bazar. Jean n’avait pas de temps à perdre.
…
« Bienvenue sur votre messagerie. Vous avez. Un. Nouveau message. Nouveau message : reçu. Aujourd’hui à 8h07. »
« Oui, bonjour Gidéon, c’est Jean à l’appareil. On ne se connaît pas encore vraiment, enfin, si moi, je vous connais, mais bon, enfin, oui, voilà, heu, c’est moi qui vous ai envoyé ces mails là, ce matin, je sais que vous les avez signalés comme spam et tout ça, mais c’était sérieux, en fait. Heu, du coup, j’aimerai bien vous expliquer tout ça de vive-voix, donc je vais passer vous voir dans la journée, je suis en route là. Voilà, c’était pour vous prévenir, mais vous inquiétez pas, c’est cool, hein ! Voilà, bah à toute à l’heure alors. C’était Jean. »
« Fin des messages. Pour réécouter, tapez 1, archiver tapez 2, effacer tapez 3. Pour rappeler votre correspondant, tapez 5. Sinon, vous pouvez raccrocher ».
Ça faisait maintenant cinq minutes que Gidéon était là, assis dans son RER, le téléphone collé à l’oreille, les yeux écarquillés, à se demander si ce message et les mails qu’il avait reçu ce matin étaient une blague et si oui, quel genre d’abruti trouvait ça drôle.
Qu’est-ce que c’était que cette histoire ? Est-ce qu’il devait avoir peur ou juste s’en foutre ? Est-ce que ça pouvait être une erreur ? Non, le mec l’avait appelé par son prénom et bon, des Gidéon, y’en a pas des milliards, ça serait vraiment une sacrée coïncidence. Mais pourquoi on lui laissait ce genre de message à lui ? Ça devait être encore une connerie de jeu radio ou télé ou je sais pas quoi. Ouais voilà, un de ces sites à la con qui permet à des soi-disant potes d’en piéger un autre avec des histoires abracadabrantes. D’habitude le jeu c’était de faire débarquer les flics chez des gens en pleine nuit pour rien…Oh putain ! Et si ces connards (qui d’ailleurs ?) faisaient débarquer les keufs à son boulot ? Non mais non !
Gidéon était en train d’imaginer tous les scénarios possibles lorsqu’ il arriva à sa destination et descendit du wagon. Il n’avait pas arrêté pas de se faire toutes sortes de films depuis qu’il avait écouté le message de ce Jean. Il faisait toujours ça de toute façon, c’était son truc. Souvent, quand il marchait dans une station de métro, il se mettait à imaginer ce qu’il se passerait si quelqu’un le poussait sur les rails ou s’il se faisait braquer. Comment il s’en sortirait, comment réagiraient les gens autour de lui, ce qu’il dirait, ce qu’il ferait… Parfois, il s’imaginait avoir un accident et se demandait ce que ça ferait d’avoir une jambe cassée. Parfois, dans sa tête, on lui apprenait qu’il avait une maladie incurable et il se voyait tout plaquer pour aller visiter le Grand Canyon et finir ses jours au soleil, seul avec sa maladie qui n’existait pas.
Une fois encore, le scénario était joyeux.
« Et si c’est un serial killer qui a décidé de me prendre pour cible ? Je ne sais même pas à quoi il ressemble en plus, je serai incapable de l’identifier. Ça se trouve c’est lui, là, avec sa capuche. Ou l’autre type là-bas sur le banc qui lit son journal. Qui lit le journal à 9h30 du matin sur un banc en plein hiver, d’abord ? Putain, c’est lui ?! Non, arrête calme-toi, trace ta route, pas de contact visuel, trace. Il me regarde ? Non. Si ? Non. Putain, c’est quoi ce délire ? Ça m’a rendu complètement parano, merde ! »
Il arriva enfin à son bureau, scanna son badge pour entrer, salua les deux hôtesses de l’accueil et prit l’ascenseur pour rejoindre le deuxième étage de l’immeuble. Lorsqu’il posa son sac à côté de sa chaise dans l’open space, il était livide et en sueur.
Il lui fallait un café. Gidéon se dirigea vers la petite cuisine de l’étage, aménagée avec quelques tabourets et des tables hautes, où ses collègues et lui prenaient leurs pauses. Ils s’y retrouvaient aussi le matin, autour d’une tasse de café avant d’attaquer la journée. Ce matin, Gidéon était tellement perturbé qu’il ne remarqua pas que quelqu’un était déjà assis sur l’un des tabourets lorsqu’il entra dans la pièce.
Il saisit sa tasse fétiche, un mug où l’on pouvait voir un dessin représentant Joey Tribbiani de la série Friends, avec inscrit en dessous « Joey doesn’t share food ! », réplique culte du personnage, mais aussi devise de Gidéon, que ses collègues taquinaient souvent sur son manque de générosité lorsqu’il s’agissait de nourriture. Il alluma la cafetière, positionna la tasse et appuya sur le bouton pour lancer la préparation d’un double allongé.
Tandis que son café coulait, il continuait à se repasser le mystérieux message en boucle dans sa tête. Jean, Jean, Jean…il avait beau se retourner les neurones, il ne connaissait pas de Jean ! Et ce mail, ces histoires d’apocalypse, sérieusement, à quoi ça rimait… Son café terminé, il se retourna pour aller chercher un sucre sur l’une des tables. Il fit un bond et faillit renverser son café.
« Oh pu…pardon ! Je vous avais pas vu ! Bonjour. Excusez-moi, balbutia Gidéon, le cœur à deux doigts de sortir de sa poitrine. Punaise, vous m’avez fait peur !
Calme, les bras posés sur la table haute, le type regardait Gidéon d’un air amusé.
– Oh mince, ce n’était pas le but ! , dit-il. Asseyez-vous, reprenez vos esprits ! Je ne pensais pas être aussi effrayant !.
Il ne l’était pas. Il était même plutôt charmant pour ce que Gidéon pu en dire. Un homme brun, qui devait avoir trente, trente-cinq ans tout au plus Des cheveux courts, une barbe de trois jours soigneusement taillée pour avoir l’air négligée mais pas trop, des yeux sombres mais pas inquiétants. Un costume sombre, chemise blanche, cravate fine et noire. Un type comme on en voit des centaine dans Paris chaque jour.
Gidéon s’assit à la même table que l’inconnu, souffla un bon coup et mélangea un sucre dans son café. Il souriait à moitié, à la fois gêné et amusé par sa propre réaction.
« Excusez-moi hein, je suis pas comme ça d’habitude, mais ça a été rude ce matin ! dit Gidéon, Et donc, vous avez rendez-vous avec quelqu’un ? C’est Mégane, de l’accueil qui vous a installé ici ? Elle vous a offert quelque chose à boire ? demanda-t-il, se rappelant qu’il était au boulot et qu’il y avait certaines règles élémentaires à respecter avec les visiteurs.
– A vrai dire, c’est vous que j’attendais. Je suis Jean, je vous ai laissé un message tout à l’heure ».
C’est super bien, j’ai tout lu les 3 chapitres d’une traite. A quand la version complète sur Kindle ?
Merci ! La version Kindle complète, c’est quand je serai grande ! J’essaie déjà de finir d’écrire l’histoire en entier !